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L'abbé Jean Daligault

 

 

Jeunesse :

Jean Daligault est né à Caen en 1889. Il fait ses études au lycée Malherbe de cette même ville et entre au séminaire avant d'être mobilisé en 1918. Il est envoyé en occupation en Allemagne, puis en Syrie en 1919. Il profite de ce séjour pour visiter le Moyen-Orient.

Ordonné prêtre à Bayeux en 1924, il est vicaire à Vire en 1925 puis en 1927 et 1928 à Trouville. Il est nommé curé d'Ollendon. Il se rend souvent à Paris pour y rencontrer des artistes déjà célèbres en 1930.

En 1935 et 1936, il voyage en Europe. Il est nommé « prêtre habitué » ce qui signifie qu'il est libéré de toutes taches d'ordre religieux. Pendant ce temps, il réside chez sa mère à Caen, mais il est tout de même attiré par les grands espaces. En 1937, il profite de sa liberté pour reprendre les voyages. Il part donc avec son frère et un ami en Amérique du Nord, visite plusieurs pays, en ramène des dessins. Il a le goût de la liberté, de l'audace et du non-conformisme ( maints témoignages le confirment ).

En 1939, Daligault est mobilisé à Rouen. Dès l'occupation, il manifeste son hostilité au nazisme par son adhésion au réseau de résistance Hector.

En 1940, il est appelé à reprendre du service en Église. Il est nommé vicaire à Villerville pour seconder le prêtre de la paroisse, souffrant. C'est ici qu'il est convoqué par la Kommandantur, le 31 août 1941.

 

Premières incarcérations

Daligault est incarcéré à Caen puis à Rouen et enfin transféré à la prison du Cherche-Midi à Paris. Il subit des interrogatoires très violents par les services de contre-espionnage de l'armée allemande : dents cassées, traces de coups et effondrement psychique si bien qu'il est hospitalisé à Saint-Anne. Au cours de l'été 1942, il est transféré à la prison de Fresnes dans l'attente d'un convoi de NN ( Nacht Und Nebel = Nuit et Brouillard ) pour l'Allemagne.

 

Premiers camps de concentration

11 octobre 1942: premier camp: Hinzert où Daligault reste jusqu'au 22 mars 1943. Dans ce camp, il subit des humiliations et des sévices pire que la mort, gérés par les SS. Il est, selon un témoignage de 1942, «  jeté dans une piscine » puis ressortit et juché sur un tronc d'arbre jusqu'à ce que ses vêtements sèchent, et enfin, soumis à une douche alternativement brûlante et glacée. Cela ne l'empêche pas toutefois de donner son calot dont le port est obligatoire à l'appel, à un camarade qui a perdu le sien, risquant pour lui-même la terrible correction habituelle.

 

Un artiste avant tout

Aux persécutions s'ajoute la faim. En dépit de tout, l'artiste, l'humoriste subsistent chez l'Abbé. C'est ainsi qu'il ramasse tous débris de bois susceptibles d'être sculptés. Il a l'audace, selon un autre témoignage, de se placer à l'appel face à un commandant dont il sculpte le visage avec pour seul outil un morceau de cercle de tonneau qu'il a affûté. Le SS l'observe, lui arrache la petite sculpture mais lui laisse le « couteau » pour qu'il puisse recommencer à leur fournir de telles œuvres d’art. L'abbé Daligault survit notamment grâce aux aliments qu'il échange contre ses sculptures.

 

De nombreux déplacements

L'Abbé quitte Hinzert le 22 mars 1943, passe 3 jours à la prison de Trêves pour être ensuite interné le 25 mars à la prison de Wittlich, d'où il est transféré le 6 mai à Cologne. Ramené le 10 juillet suivant à Wittlich, il est interné le 8 septembre à la prison de Trêves pour être jugé car c'est ici que siège alors le « Tribunal du peuple ».

La prison de Trêves est placée sous le contrôle de l'administration pénitentiaire allemande et non des SS. Selon divers témoignages, le régime des détenus n'a aucune ressemblance avec celui du camp d'Hinzert : le couchage est correct, la nourriture est certes insuffisante, mais ni sévices ni brutalités ne sont attribués. Ces nouvelles conditions de survie permettent à Daligault de se consacrer aussi bien à sa passion artistique qu'à son souci du témoignage.

 

Des supports étonnants

Il utilise, dans cette prison, différents moyens à sa disposition : un morceau de planche de son lit, des pieds de tabourets ou des morceaux de papiers journaux destinés à un autre usage que celui qu'il en fait. Avec une extraordinaire qualité artistique, il sculpte, dessine et peint.

Les premiers dessins, les premières peintures, ont pour support le papier journal enduit on ne sait comment. Les couleurs sont obtenues par des moyens de fortune : le vert et le noir grattés sur les murs de la cellule, le brun et le jaune tirés de la rouille provoquée sur la pelle à poussière, le blanc fait de savon. Par la suite, certains gardiens complaisants, désireux de posséder un portrait d'eux-mêmes, lui apportent crayons, encre et peinture, parfois du plâtre pour les sculptures ou à défaut un produit qu'on soupçonne être du kaolin.

Mais l’ingéniosité de l'abbé Daligault est telle qu'il sculpte a deux reprises des os trouvés dans sa soupe, les polissant avec toute la patience d'un homme privé de liberté.

Après sa comparution devant le tribunal du peuple siégeant à Trêves, sa liberté ne lui est pas rendue. Il est accusé, comme ses camarades, d’espionnage. Il ne sera pas jugé ni pour autant libéré.

 

Des œuvres au destin miraculeux

Au fur et à mesure de la réalisation de ses œuvres, l'abbé Daligault demande à l'abbé Jonas, aumônier de la prison de Trêves, d'en être le dépositaire  ; ce que ce dernier accepte. Mais en 1944, le presbytère de l'abbé Jonas est entièrement détruit par les bombardements. Les œuvres fragiles de

l’artiste sont ensevelies sous les ruines. Une fois le déblaiement achevé, elles sont miraculeusement retrouvées intactes.

 

Derniers soupires

Hélas, l'abbé Daligault, lui, a quitté la prison de Trêves le 18 août 1944, pour celle de Stadelheim à Munich, d'où il est transféré le 27 avril 1945 à Dachau. Il arrive au camp dans un état squelettique, la nuit précédant la libération du camps par les Américains le 28 avril 1945. Il fut aussitôt abattu d'une balle dans la nuque.

=> En plus, nous avons ajouté un fichier PDF ci-contre pour voir les œuvres que Jean Daligault a pu réalisées dans sa vie.

Autoportrait de Jean

Daligault ci-contre

Photographie de Jean Daligault ci-contre

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